édictant des décrets lois sur tous les sujets. Aucun article de la constitution
de 1987 ne lui reconnait de telles prérogatives. Le principe de la
séparation des pouvoirs n’est qu’un vain mot pour l’administration de
Monsieur Moise.
Une administration illégitime engage la nation.
Les principales institutions républicaines sont aujourd’hui, soit
dysfonctionnelles, soit aux mains de responsables appointés en dehors des
prescrits constitutionnels. Les nominations à être effectuées aux postes de
commandant en chef des Forces Armées d’Haïti et des Forces de Police,
conseils d’administration de la Banque de la République d’Haïti de la
banque nationale de crédit, requièrent, aux termes de l’article 241 de la
constitution l’approbation préalable du Sénat de la République.
Les citoyens placés, à titre intérimaire, aux commandes de ces institutions
ne peuvent nullement prétendre jouir dans la conduite de leurs actions du
principe dit de compétence « rationae materiae ». Il en est de même pour
ceux récemment affectés aux missions diplomatiques haïtiennes à
l’étranger, à titre d’Ambassadeurs extraordinaires et plénipotentiaires et
de Consuls généraux. Ils se retrouvent en situation d’illégitimité
constitutionnelle par rapport aux fonctions qu’ils occupent.
Article 141: Le Président de la République, après approbation du Sénat, nomme par
arrêté pris en Conseil des Ministres, le Commandant en Chef des Forces Armées, le
Commandant en Chef de la Police, les Ambassadeurs et les Consuls généraux.
L’approbation sénatoriale pour les titulaires de ces institutions garantit non
seulement la durée de leur mandat triennal, mais leur permet aussi
d’exercer leur charge en toute autonomie. Le renvoi, moins d’une année
après sa prise de fonction d’un Directeur général nommé à titre intérimaire
aux commandes de la Police Nationale d’Haïti, témoigne éloquemment
de la vulnérabilité et de la dépendance des responsables, irrégulièrement
nommés, aux caprices du Président. Ces différentes actions et décisions
du Président Moise sont des cas avérés de violation de la Constitution.
Article 270: Le Commandant en Chef des Forces de Police est nommé, conformément à
la Constitution, pour un mandat de trois (3) ans renouvelable.
Haïti est une nouvelle fois hanté par le spectre du chaos et de l’anarchie.
Le débat politique actuel tourne autour du constat, fait par le Président
Jovenel Moise lui-même, de la caducité du parlement. Cette annonce
avait aussi entrainé le renvoi des sénateurs élus aux joutes électorales de
2015 et 2016. Ces derniers, se référant aux stipulations de l’article 95 de la
constitution, à tort ou à raison, ont exigé le respect de leur mandat de six
ans (6): Ledit article est ainsi libellé « Les sénateurs sont élus pour six (6) ans
et sont indéfiniment rééligibles ».
Le Président Moise, en raison de ce vide parlementaire qu’il a savamment
préparé, s’est écarté de la légitimité constitutionnelle. Cette situation s’est
aussi aggravée par un manque évident d’intérêt à trouver avec les forces
de l’opposition politique un accord minimal portant sur la gouvernance
du pays. Cette succession de crises, non seulement, menacent les plus
légitimes aspirations de la population, mais plus encore, les fondements
mêmes de la nation. A cela s’ajoutent des questionnements autour de la
fin du mandat du Président Moise et de ses velléités de changer la
constitution du pays. L’organisation des élections législatives, devenue la
principale urgence de l’heure ne fait pas l’unanimité au sein de la classe
politique. Cette dernière refuse, toute participation à une compétition
électorale organisée par l’administration Moise-Jouthe.
Jocelerme PRIVERT
57e Président de la République
Décembre 2020