Parlementaires et abus de fonction au nom de la Constitution. Le Parlement dans son fonctionnement actuel est la traduction de cette expression chère aux tenants de l’État de droit : « tout homme qui a du pouvoir a tendance à en abuser ». Le régime mi- présidentiel mi- parlementaire institué par la Constitution a fait du Parlement un monstre par l’étendue de ses pouvoirs. Le Parlement haïtien, en plus de ses missions classiques de légiférer et de contrôler l’action gouvernementale communes à tous les parlements du monde, dispose de très importants leviers pour influencer dans un sens ou dans un autre la vie politique du pays. Les élus des quatre dernières législatures, à la recherche constante d’une visibilité politique sur le terrain, se sont ostensiblement travestis, au détriment de leurs fonctions statutaires, en agents de développement. Cette nouvelle compétence, non prévue par aucune disposition constitutionnelle ou légale, les conduit, à longueur de journée, à sillonner les couloirs des différents ministères pour déposer des requêtes de financement. Ainsi se retrouvent-ils en pleine compétition avec les représentants de l’administration centrale et les organes exécutifs des collectivités territoriales, engagés dans des activités de production de biens et de services, de construction d’infrastructures et d’exécution de projets dans leurs circonscriptions respectives. Cette déviation de leurs attributions régulières est source de toute forme de marchandage politique, de corruption et d’enrichissement illicite. Le vote des lois, l’approbation de certains actes et décisions ou encore l’appui d’une majorité au gouvernement sont négociés quand ils ne sont pas, tout simplement, assortis de viles conditions. La reddition de comptes, à laquelle sont astreints les membres du gouvernement, relève de la compétence du Parlement dans l’exercice de son pouvoir de contrôle. L’objectif d’une saine gestion de la chose publique, voulu par les constituants, de ceux qui ont eu à assumer la responsabilité est galvaudé. Le Parlement en a fait un instrument de répression ou de barrages politiques, contre d’éventuels candidats. Les élections à venir doivent être un choix entre la persistance de la crise politique ou un engagement irréversible sur la voie de la stabilité politique. Jocelerme PRIVERT 57e Président de la République Février 2021