Jocelerme Privert, ancien ministre, sénateur, et président de la République, est une figure
intrigante de la scène politique haïtienne. Sa trajectoire, marquée par une capacité à évoluer
entre différents régimes et idéologies, rend difficile son classement dans un camp politique
traditionnel, qu’il soit de gauche ou de droite. Passer du duvaliérisme à L’avalas est, en effet,
une transition complexe et peu commune, qui témoigne d’un pragmatisme ou d’un opportunisme politique
selon les interprétations.
Privert incarne une certaine malléabilité politique, avec des amitiés et des alliances tissées dans
presque tous les camps de l’échiquier politique haïtien. Cette capacité à naviguer entre des milieux
idéologiquement opposés pourrait expliquer son long parcours au sein de l’appareil d’État, malgré les
bouleversements politiques constants en Haïti.
Un témoin clé de l’histoire récente d’Haïti
Le 12 décembre 2024, Jocelerme Privert publiera ses mémoires aux éditions L’Harmattan à Paris, un
événement rare dans l’histoire politique haïtienne. Son ouvrage, intitulé Haïti, mon pays : Histoire
insolite d’un destin présidentiel, représente une contribution précieuse à la mémoire collective d’un
peuple qui lutte pour préserver son identité et son histoire.
Il faut souligner que très peu de présidents haïtiens ont pris le soin de documenter leur passage au
pouvoir. François Duvalier avait publié des ouvrages, mais son fils Jean-Claude et d’autres figures clés
de la politique haïtienne se sont rarement exprimés sous cette forme. Jocelerme Privert, en tant que témoin
privilégié de plusieurs périodes critiques de l’histoire récente, semble vouloir briser cette tradition de silence
Un parcours complexe : du technocrate à l’homme d’État
Jocelerme Privert s’est imposé comme une figure centrale du système haïtien au fil des décennies. Il a occupé
des postes stratégiques :
Directeur général de la Direction Générale des Impôts (DGI), où il a acquis une réputation de technocrate compétent.
Ministre de l’Intérieur sous Jean-Bertrand Aristide, devenant un témoin direct et actif du renversement d’Avalas en 2004.
Sénateur et finalement président provisoire en 2016, une fonction qu’il a occupée à un moment de crise politique majeure,
avec pour mission de gérer une transition particulièrement délicate.
Privert a ainsi traversé des régimes opposés, passant d’un rôle administratif sous l’influence du duvaliérisme à une
participation active au sein d’un gouvernement issu de l’Avalas. Cette trajectoire reflète une capacité à s’adapter
aux circonstances, mais elle soulève aussi des questions sur ses convictions politiques profondes.